OBJET : Demande d’audience d’urgence à la suite des attaques perpétrées à l’encontre des établissements et personnels pénitentiaires
Monsieur le Garde des Sceaux,
À la suite des actes lâches et odieux perpétrés contre les personnels pénitentiaires et leurs familles tant sur leurs lieux de travail, qu’à leurs domiciles, l’UFAP UNSa Justice sollicite une rencontre dans les plus brefs délais pour échanger sur cette situation inédite des plus alarmantes.
Depuis maintenant 10 jours, les personnels et l’institution sont la cible d’individus qui semblent refuser que le système carcéral français évolue… Sans doute pour continuer de gérer « leur business » depuis l’intérieur des prisons. La création d’établissement spécialisés a été revendiquée par notre Organisation Syndicale pour sortir de l’immobilisme carcéral qui conduit aujourd’hui à un échec.
Nous faisons face à une frange de la société qui n’a que faire des règles en vigueur et bafoue l’autorité de l’Etat sans ne rien craindre en retour. Il est donc plus que temps de changer de braquet et de tout mettre en œuvre afin d’assurer la sécurité des personnels pénitentiaires tant à l’intérieur qu’à l’extérieur, tant sur leur lieu de travail que dans leur vie privée. L’autorité de l’Etat ne se négocie pas, elle s’impose !
Cette rencontre nous permettrait d’évoquer avec vous les options envisageables dans les plus brefs délais et les priorités qui s’imposent en termes de sécurité des personnels, des emprises foncières périmétriques des structures et des établissements mais aussi des détentions.
Voici en quelques lignes les principales mesures que nous souhaiterions discuter avec vous :
- La mise en place d’un plan Vigipirate immédiatement au niveau « sécurité renforcée » ciblant le domaine particulier d’activité de l’administration pénitentiaire sur l’ensemble du territoire, avec le renfort de l’armée si cela s’avérait nécessaire.
- Un plan ambitieux de sécurisation de l’ensemble des domaines, des structures pénitentiaires et de l’ENAP. Ce plan ne devra pas se limiter à la pose de grillages mais bel et bien ceinturer nos établissements par des dispositifs anti-intrusions efficaces (enrochement, concertina, brise-vue métallique, …) ainsi qu’un système de vidéosurveillance efficient. En effet, le plan actuel de sécurisation des domaines pénitentiaires, au-delà des carences dans sa mise en œuvre, est aujourd’hui dépassé et ne répond pas à la réalité du quotidien des agents, à l’urgence et à la gravité de la situation.
- La création de zones de défense Pénitentiaire, avec l’intégration dans celles-ci des sites pénitentiaires car les FSI n’ont pas les moyens de sécuriser en permanence nos structures. Ce nouveau cadre juridique devra prévoir les modalités d’usage de la force et des condamnations pénales exemplaires.
- Une réévaluation des effectifs des Equipes Locales de Sécurité Pénitentiaire est nécessaire, afin que ceux-ci puissent assurer une réelle sécurisation périmétrique des structures et des zones de défense pénitentiaires avec un contrôle d’accès à l’entrée du site par ces agents armés. Il conviendra également de réévaluer l’équipement dédié à ces équipes au regard des missions confiées (véhicules, dotation armes longues…).
- Un plan Marshall de comblements des vacances d’emplois, estimé aujourd’hui tous corps et grades à environ 4000 emplois dont 3000 pour la filière des Personnels de Surveillance. Ce manque de personnels génère des conditions de travail difficiles, une insécurité croissante et un mode dégradé au quotidien. Il est urgent de réarmer en personnel notre institution !
- L’anonymisation de l’ensemble des personnels dans les procédures administratives et judiciaires à l’instar de celle prévue pour les établissements de haute sécurité, car nous ne souhaitons pas vivre un « Magnanville » pénitentiaire.
- Pour nos collègues en tenue non habilités au port de l’arme, s’ils le souhaitent, la possibilité via une procédure simplifiée d’obtenir l’autorisation de détenir et porter une arme selon un cadre réglementé.
- Pour les collègues formés et habilités au port de l’arme, s’ils le souhaitent, être autorisés à conserver celle-ci en dehors des heures de service dans un cadre réglementé.
- La création d’une antenne de l’ENAP sur la région parisienne qui permettrait d’absorber ce besoin vital de comblement des vacances de postes.
- La création de Centres de Formation Continue interrégionaux sur le modèle de celui de Paris.
- La fin de l’isolement des personnels pénitentiaires, par la mise en place d’équipes mobiles dans l’ensemble des détentions et la fin des déplacements seul en dehors des structures pénitentiaires. De cette manière, nous maintiendrons le rapport de force de notre côté et sécuriserons les agents.
- Une augmentation de la PSS pour l’ensemble des personnels pénitentiaires, liée à notre statut spécial mais aussi aux risques encourus. Plus que jamais, les personnels pénitentiaires risquent leur vie. Si nous convenons que la vie n’a pas de prix, une légitime reconnaissance est nécessaire !
- Un plan de lutte contre la surpopulation pénale avec une augmentation du parc immobilier pénitentiaire et un recours accru aux alternatives à la détention.
Au-delà des annonces faites par vous-même ou monsieur le ministre de l’Intérieur, il est urgent de concentrer les efforts sur des solutions pérennes. L’insécurité permanente dans laquelle évoluent les personnels pénitentiaires doit cesser tant à l’intérieur qu’à l’extérieur des établissements et services.
Sans une action courageuse et un message fort, l’inquiétude et la grogne légitimes des agents iront grandissantes dans un climat de tensions déjà énorme et des conditions d’exercice qui se dégradent chaque jour un peu plus.
Le principe de sécurité des personnels pénitentiaires ne saurait être une variable d’ajustement de contraintes politiques ou budgétaires.
L’État ne peut ni ne doit céder face aux intimidations et aux tentatives de déstabilisation dont il est l’objet. Mais pour que cela soit parfaitement clair, l’UFAP UNSa Justice ne reculera pas d’un pouce sur la question cruciale de la sécurité des agents et de leurs familles directement exposés à ces attaques inacceptables.
Si aucune réponse concrète n’est apportée rapidement, nous mettrons tout en œuvre pour faire entendre la colère des personnels.
Dans l’attente de votre réponse, je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Garde des Sceaux, l’expression de ma plus profonde considération.
Le Secrétaire Général,
Emmanuel CHAMBAUD