Le vendredi 21 octobre 2022, les Organisations Syndicales représentatives de la filière insertion et probation étaient conviées pour la présentation des outils mis à disposition des personnels dans le cadre du déploiement de la LSC de plein droit, du bilan de l’expérimentation du programme ADERES et du projet de labellisation des associations partenaires du SPIP. Cette réunion répondait à une demande des organisations syndicales et notamment de l’UFAP UNSa Justice, suite aux débats sur la circulaire d’application relative à la LSC de plein droit et aux nouvelles remises de peine et à la généralisation en catimini du programmes ADERES.
Très vite, les débats ont tourné au vinaigre sur l’ensemble des points. D’une part, l’UFAP UNSa Justice a dénoncé la tentative de la DAP de généraliser la prise en charge des sortants suite à l’octroi d’une LSC de plein droit au travers de l’unique prisme des programmes collectifs. Sous couvert d’une classification pseudo-criminologique – prise en charge de groupe pour les personnes « à risque de récidive fort ou moyen » , prise en charge individuelle pour les personnes à « faible risque de récidive » – la DAP tente d’imposer un mode de prise en charge basé sur un critère de répartition difficile à élaborer, dont la pertinence n’est étayée par aucune étude nationale ou internationale et au mépris des compétences statutaires des CPIP. Ce sont pourtant ces derniers qui sont les plus compétents au regard de leur statut, de leur expertise et des outils à leur disposition à évaluer les besoins des PPSMJ et élaborer la prise en charge la plus adaptée.
D’autre part, la généralisation à marche forcée de l’usine à gaz « ADERES » va impacter tous les services, sans qu’aucune évaluation de son efficacité sur la prévention de la récidive et sur la capacité de l’ensemble des SPIP à la mettre en œuvre n’ait été réalisée. L’UFAP UNSa Justice a donc réaffirmé son opposition au déploiement de ce programme, en rappelant la réalité des terrains : ce programme lourd et ambitieux se déploie dans un contexte de saturation des services et de grande fatigue des agents. Une fois encore on demande aux personnels de faire plus et plus vite, avec des process rigides qui leur laisseront peu ou pas de marge de manœuvre !
L’UFAP UNSa Justice a également rappelé la multiplication des priorités qui incombent aux agents et les mettent actuellement sous pression. Les dossiers VIF, les commandes institutionnelles diverses et variées (animation des stages citoyenneté ou des stages de sensibilisation aux VIF), la gestion quotidienne des DDSE ou tout simplement les effectifs chargés, bien loin des normes européennes, posent déjà de grandes difficultés dans beaucoup de services. De plus, si les disparités territoriales ne sont pas prises en compte, leur déclinaison sans nuance dans les petites structures risque d’être une vraie catastrophe. En l’état actuel, la façon dont le programme ADERES s’apprête à être mis en musique, c’est un éléphant qui déboule dans un magasin de porcelaine.
Enfin, la DAP a présenté son projet de labellisation des associations travaillant avec l’AP et les SPIP. Il s’agit de reconnaître à travers un cahier des charges présenté comme exigeant les compétences de certaines associations gravitant autour de notre institution.
L’UFAP UNSa Justice a émis une objection pragmatique : celle du risque de labellisation d’associations concurrentielles aux SPIP et qui par leur habileté et leur lobbying actif seraient en mesure de répondre aux cahiers des charges en mettant en avant des actions ponctuelles. Pour notre organisation syndicale, les missions des SPIP doivent être sanctuarisées et donc reconnues comme faisant partie du domaine régalien de l’État. L’action des associations partenaires doit intervenir en complément via un cahier des charges strict et uniquement dans un champ d’action qui leur est propre (addictions, santé mentale ou physique, aide au logement ou à la recherche d’emploi, médiation familiale etc.)
En définitive, cette réunion a confirmé la déconnexion de la DAP vis à vis de certains enjeux concrets de la prise en charge des PPSMJ, en particulier lorsqu’elle s’enferme dans la posture idéologique et pseudo-scientifique qui prévaut à la sous-direction de l’insertion et de la probation depuis l’adoption du RPO 1.
Pour l’UFAP UNSa Justice, il serait temps que la DAP prenne un virage pragmatique dans sa manière de considérer l’action des SPIP et de l’Administration pénitentiaire en direction des personnes qui leur sont confiées. C’est pourquoi elle revendique de longue date :
– l’affirmation du caractère régalien de toutes les missions dévolues à nos services et la centralité de l’expertise des personnels dans la prise en charge des PPSMJ ;
– le conventionnement du partenariat associatif et des structures financées par l’AP sur la base d’un cahier des charges strict et transparent ;
– la dotation des services en moyens suffisants à leur fonctionnement et à la prise en charge des besoins concrets des personnes suivies par le SPIP ;
– la diversification et la pérennisation des structures et des programmes d’aménagement de peine et l’amélioration de l’accès des PPSMJ aux services de l’État et aux partenaires identifiés en MO et en MF ;
– un investissement massif et homogène dans la formation initiale et continue de tous les personnels ;
– le développement d’une méthodologie sûre et consensuelle pour la construction des programmes de prise en charge, la mise en œuvre des expérimentations et l’évaluation des politiques d’insertion et de probation, dans le respect du dialogue social et des prérogatives des organisations représentatives à tous les niveaux hiérarchiques.
Pour L’UFAP UNSa Justice
Simon-Pierre LAGOUCHE, secrétaire national