Jeudi dernier s’est tenu un Comité Social d’Administration de l’Administration Pénitentiaire (CSA AP) au cours duquel l’un des points à l’ordre du jour était le traitement infra disciplinaire des fautes commises par les détenus au sein de nos établissements pénitentiaires. Cette pratique, qui est actuellement en vigueur dans une soixantaine d’établissements, visait principalement des fautes de troisième degré en proposant des alternatives aux sanctions disciplinaires. En l’absence d’un cadre réglementaire clair, l’Administration a souhaité officialiser ce procédé par un décret afin que cette pratique, entre autres, permette de traiter certains incidents mineurs de manière alternative dans le but d’éviter des classements verticaux. Cette idée qui apparaissait comme une initiative positive n’est, dans les faits et telle que proposée, qu’un mauvais coup de plus porté à l’autorité des personnels !
En effet, les services de la DAP ont une vision très large de la procédure alternative à la discipline en incluant l’ensemble des infractions de deuxième degré voire même, certaines du premier degré avant de se raviser sous la pression de notre organisation syndicale et le tollé médiatique ! Il a fallu intervenir en séance pour exclure certaines fautes du deuxième degré liées à l’utilisation et à la possession de stupéfiants ainsi que celle ayant trait à la corruption. Le DAP a reconnu son erreur et s’est engagée à les réintégrer dans le schéma disciplinaire des détenus que l’on connait aujourd’hui. S’il est vrai que cette alternative n’exclut pas la possibilité d’un passage en commission de discipline, l’UFAP UNSa Justice n’est pas dupe et mesure parfaitement la volonté d’une libéralisation carcérale de la part de certains chefs d’établissement.
Dans le même temps, la DAP avait-elle le choix au regard du discours prononcé par le Président de la République qui a réaffirmé la restauration de l’autorité républicaine en lançant l’opération “Place Nette XXL” le 18 mars dernier à Marseille, ainsi que les déclarations du GDS devant les sénateurs le 8 avril quant à l’usage des stupéfiants avec l’opération “Place Nette en Prison”.
L’UFAP UNSa Justice a souligné que l’autorité des personnels pénitentiaires était constamment remise en question dans les établissements et que le traitement infra disciplinaire de fautes importantes affaiblirait encore davantage cette autorité. D’ailleurs, nous avons rappelé l’engagement pris et signé par le Ministre avec les Organisations Syndicales à Bordeaux s’agissant de la Charte du Surveillant, Acteur incontournable d’une détention sécurisée qui visait bien à restaurer l’autorité des surveillants. En imposant l’élargissement XXL des mesures alternatives aux procédures disciplinaires comme ils l’entendent, l’administration et le Garde des Sceaux mettent un coup de canif dans le contrat et légalise l’impunité avec un tel décret.
Pour l’UFAP UNSa Justice, il est amer de constater qu’après avoir réussi à faire diminuer les peines infligées aux détenus, les deux tiers des infractions commises en détention relèveront de la procédure infra disciplinaire et seront décidées à la discrétion de la hiérarchie. En effet, l’Administration n’a pas retenu les divers amendements de notre organisation syndicale visant à exclure les fautes du deuxième degré et certaines du troisième du champs infra disciplinaire, ainsi que l’amendement précisant que tout traitement infra disciplinaire devait être approuvé par l’auteur du compte rendu d’incident.
Dans un contexte où l’État cherche à rétablir son autorité sur l’ensemble du territoire, les prisons risquent de devenir encore un peu plus des lieux de non-droit. Obnubilée par une certaine idéologie propre à certaines autorités soi-disant indépendantes mais qui produisent des rapports partiaux, notamment contre les Quartiers disciplinaires des établissements, l’administration loin des maux qui font souffrir les personnels en contact direct des PPSMJ, préfère orienter sa politique carcérale dans le concept du « détenu modèle » et de l’angélisme pénitentiaire : une utopie !
L’UFAP UNSa Justice, en tant qu’organisation responsable, a voté contre ce projet, tout comme la CGT et le SPS. Une seule organisation s’est abstenue, ce qui a permis le passage de ce texte. Chacun jugera de la pertinence de cette décision.
Pour les Représentants du CSA AP
Le Secrétaire Général
Emmanuel CHAMBAUD